Les complémentaires santé sont sous pression, confrontées à une augmentation spectaculaire de leurs remboursements aux assurés. Cette situation engendre des inquiétudes quant aux augmentations tarifaires inévitables pour les clients. De plus, ces acteurs pointent du doigt des transferts de charges de la Sécurité sociale qui les affectent directement. Un communiqué commun publié par les trois grandes familles du secteur, à savoir les assureurs, les mutuelles et les institutions de prévoyance, révèle que les prestations de santé versées aux assurés ont connu une augmentation de plus de 4% au premier semestre de 2023. Les complémentaires santé anticipent même une accélération de cette tendance en 2024, entraînant des dépenses supplémentaires d’un montant de 1,5 milliard d’euros à financer.
Des Hausses de Tarifs en Vue
Plusieurs acteurs du secteur annoncent des hausses significatives de leurs remboursements pour 2023. Malakoff Humanis, par exemple, estime que sa hausse atteindra environ 7% cette année. Traditionnellement, le secteur connaissait des hausses de 2 à 3% par an, ce qui permettait une gestion stable et sans à-coups. Toutefois, 2022 a déjà vu une hausse de 5 à 6%, et 2023 s’annonce encore plus inquiétante, avec une hausse de près de 7%. Au total, ces acteurs anticipent une augmentation des dépenses de près de 20% sur trois ans, jusqu’en 2024. Une situation sans précédent.
Une Analyse des Coûts en Hausse
Un spécialiste du secteur, Addactis, prévoit des hausses tarifaires de 9 à 11% pour les complémentaires santé individuelles, et de 8 à 12,5% pour les contrats collectifs souscrits par les entreprises pour leurs salariés. Les complémentaires santé imputent la croissance de leurs dépenses à la tendance générale observée au niveau de l’Assurance maladie. Cependant, elles soulignent également un transfert de charges de l’Assurance maladie vers les complémentaires santé.
Réforme du 100% Santé et Nouveaux Défis
La réforme du 100% Santé, qui garantit un remboursement complet des dispositifs médicaux, a accru la part de prise en charge des complémentaires santé dans les domaines de l’optique, de la dentaire et de l’audiologie. Depuis le 15 octobre, l’Assurance maladie ne rembourse plus que 60% des soins dentaires, contre 70% jusqu’à présent, laissant aux complémentaires la responsabilité de couvrir la part restante. Les complémentaires santé se montrent prêtes à assumer une part plus importante des dépenses de santé, mais elles souhaitent également jouer un rôle actif dans la gestion du système.
Une Question d’Équilibre Budgétaire
La Mutualité française, qui regroupe les acteurs mutualistes du secteur, plaide en faveur d’une « réforme structurelle du système de santé et de son financement », selon son président Eric Chenut. Toutefois, pour Thomas Fatôme, directeur général de l’Assurance maladie, il n’y a pas de transfert massif des charges de l’Assurance maladie vers les complémentaires santé. Il rappelle que les augmentations tarifaires annoncées par les complémentaires ne reflètent pas nécessairement l’équilibre entre les hausses et les baisses. De plus, chaque année, des centaines de milliers de personnes sont classées en « affection longue durée » (ALD), bénéficiant d’une prise en charge de près de 100% par l’Assurance maladie, ce qui génère des économies substantielles pour les complémentaires.
Les Chiffres et les Inconnues
Officiellement, les complémentaires prenaient en charge 12,6% des dépenses de santé des Français en 2022, tandis que l’Assurance maladie en prenait en charge environ 80% (avec un reste à charge de 7,2% pour les patients). Les chiffres officiels ne permettent pas encore de déterminer si les complémentaires sont plus ou moins sollicitées dans le financement des dépenses de santé. Une chose est sûre, les acteurs du secteur doivent faire face à une réalité budgétaire complexe et à des défis croissants.